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Dossier no W-0098-10 (TAC)
Dossier no SARB-6504-C5160-11861 (MdT)

TRIBUNAL DE L'AVIATION CIVILE

ENTRE :

Alta Flights (charters) Ltd., requérant(e)

- et -

Ministre des Transports, intimé(e)

LÉGISLATION:
articles 210(1) du Règlement de l'Air
articles 826(1) du Règlement de l'Air
C.R.C., c. 2, art. 210(1)(a), 826(1)

Inscriptions aux livres de bord, Certificat de navigabilité


Décision à la suite d'une révision
Robert J. Rushford, Q.C.


Décision : le 30 avril 1990

TRADUCTION

Entendue : Calgary (Alberta), les 12, 13 et 14 février 1990 et le 30 avril 1990

Le ministre des Transports a abandonné les chefs d'accusation 6, 24, 25 et 27.

Les chefs d'accusation 26 et 33a) ont été rejetés.

Les chefs d'accusation 1 à 5, 7 à 23, 28, 29, 30, 31, 32, 33b), 34a) et 34b) ont été établis par preuves.

LE CERTIFICAT D'EXPLOITATION DU REQUÉRANT EST SUSPENDU POUR UNE PÉRIODE DE 14 JOURS À PARTIR DE MINUIT LE 4 MAI 1990.

L'audience de révision faisant suite à la requête précitée a été entendue par un conseiller du Tribunal, à l'hôtel Westin de Calgary, situé au 320, 4e Avenue Sud-Ouest, salle Barclay (niveau de la galerie marchande), dans la ville de Calgary (Alberta), les 12, 13 et 14 février 1990 à 9 h.

Le certificat d'exploitation du requérant a été suspendu du 27 septembre 1989 au 10 octobre 1989 en raison de 23 infractions présumées à l'article 826 (1) du Règlement de l'air.

Le certificat d'exploitation du requérant a été suspendu de nouveau, du 11 octobre 1989 au 24 octobre 1989, en raison de 11 infractions présumées à l'article 210 (1) a) du Règlement de l'air.

Il y a eu sursis jusqu'à la conclusion de la présente audience.

Les détails des violations présumées à l'article 826(1) du Règlement de l'air sont exposés dans la description des chefs d'accusation 1 à 23 de l'avis de suspension et ont trait au défaut de tenir un carnet des 23 vols effectués à bord de quatre aéronefs immatriculés respectivement C-FAFC, C-FMBG, C-GULQ et C-GRAV.

L'article 826 (1) du Règlement de l'air énonce ce qui suit :

826. (1) Le propriétaire d'un aéronef, autre qu'un avion ultra-léger, immatriculé aux termes du présent Règlement doit tenir, pour cet aéronef, un carnet de route d'aéronef et un livret technique d'aéronef.

Les détails des infractions présumées à l'article 210 (1) a) du Règlement de l'air sont exposés dans la présentation des chefs d'accusation 24 à 34 de l'avis de suspension et ont trait au pilotage d'un avion dans des conditions ne satisfaisant pas à celles qui ont donné lieu à l'émission d'un certificat de navigabilité, en ce que l'aéronef a été piloté pendant plus de 50 heures de « temps air » entre l'inspection de 50 heures et l'inspection de 100 heures. En outre, selon les chefs d'accusation 33 et 34, l'aéronef a volé au total plus que les 1800 heures de vol permises avant la révision obligatoire des deux moteurs. Chacun des chefs d'accusation 24 à 34 expose les détails des vols en cause.

L'article 210 (1) a) du Règlement de l'air énonce ce qui suit :

210. (1) Il est interdit de piloter ou de tenter de piloter un aéronef, autre qu'une aile libre ou un avion ultra-léger, à moins que l'un des documents suivants n'ait été délivré à l'égard de l'aéronef [...]

a) un certificat de navigabilité délivré en vertu de la présente partie ou des lois du pays d'immatriculation de l'aéronef; [...]

Le ministre des Transports a abandonné les chefs d'accusation 6, 24, 25 et 27.

Le ministre des Transports a présenté en preuve le relevé quotidien du trafic aérien de l'aéroport international de Vancouver, de l'aéroport international de Calgary et de l'aérodrome municipal d'Edmonton. Les relevés de Vancouver ont été présentés par Jim Kaduhr, spécialiste intérimaire du trafic par unité à la tour de contrôle de Vancouver; ceux de Calgary ont été présentés par Gordon Lowe, directeur du contrôle du trafic aérien à Calgary et ceux d'Edmonton, par Miles McCulloch, directeur de la tour de contrôle d'Edmonton.

La méthode de consignation est essentiellement la même pour tous les aérodromes. Tous les mouvements des aéronefs sont inscrits à l'ordinateur et les relevés produits ont été imprimés par l'ordinateur. De toute évidence, le système est extrêmement précis, mais il y a quand même risque d'erreur à l'identification d'un aéronef en particulier. Le système vérifie et rapproche les données pour repérer les erreurs, et le témoin, Jim Kaduhr, qualifie les identifications erronées d'extrêmement rares. Le témoin Gordon Lowe suggère un taux d'erreur de 1 sur 1200. Quant au témoin Miles McCulloch, il utilise l'expression possible, mais peu probable.

Le conseiller du requérant s'est objecté à la présentation de ces témoignages, qu'il appelle témoignages relatés, puisqu'aucun des témoins n'a compilé l'information lui-même, mais l'a extraite de registres. La règle du témoignage relaté est essentiellement qu'une partie voulant prouver un fait doit citer un témoin qui puisse témoigner directement du fait en question et non un témoin qui ne peut que rapporter une information de seconde main. Les procédures se déroulent toutefois aussi promptement et aussi simplement que le permettent les circonstances et l'équité. La nature de ces témoignages ne requiert pas une connaissance personnelle de l'événement. Demander au ministre de citer la personne qui a repéré l'avion et a saisi les données à l'ordinateur serait plus compliqué et plus onéreux que l'affaire n'en vaut la peine, à moins qu'on ne mette sérieusement en doute l'exactitude des relevés quotidiens du trafic aérien. J'ai toutefois bien pesé l'objection soulevée, confrontant le bien-fondé des relevés et la possibilité d'un manque de fiabilité, d'une part, à l'équité envers les parties, d'autre part, pour finalement admettre les relevés quotidiens de trafic aérien et leur accorder beaucoup de poids dans ma décision.

Le ministre des Transports a également présenté en preuve un document intitulé : Relevé quotidien du trafic aérien de Transports Canada — Mouvements itinérants, obtenu de Statistique Canada. Ce relevé corrobore les témoignages contenus dans les relevés quotidiens du trafic aérien de Vancouver, de Calgary et d'Edmonton.

Le ministre des Transports a enfin déposé les relevés de Master Card relatifs aux ravitaillements nécessaires à certains des vols en cause, qui confirment le fait que les aéronefs désignés ont bel et bien effectué les vols en question.

J'ai accepté les relevés de Statistique Canada et les relevés de Master Card pour les mêmes motifs que j'ai accepté les relevés quotidiens de Vancouver, de Calgary et d'Edmonton.

Je suis convaincu que les aéronefs désignés dans les chefs d'accusation 1 à 5 inclusivement et 7 à 23 inclusivement ont effectué les vols mentionnés. Je dois maintenant déterminer si le requérant n'a pas tenu un carnet de route pour les vols en cause.

À cet égard, le ministre des Transports a cité Peggy Plonka, spécialiste de l'application des règlements, qui a mené l'enquête et saisi les carnets de route déposés en preuve. J'ai examiné ces documents et je suis convaincu qu'aucune entrée n'y a été faite en ce qui a trait aux chefs d'accusation 1 à 5 inclusivement et 7 à 23 inclusivement, et comme l'exige pourtant l'article 826 (1) du Règlement de l'air.

Voyons maintenant les chefs d'accusation 26 et 28 à 34 inclusivement, qui ont tous trait à une infraction à l'article 210 (1) a) du Règlement de l'air. Les témoignages auxquels je me suis référé relativement aux allégations renvoyant à l'article 826 (1) me convainquent que les vols cités dans les chefs d'accusation 26 et 28 à 34 inclusivement ont bel et bien eu lieu. Tous les vols ont été effectués par le même aéronef, un Piper Seneca immatriculé C-FAFC. L'aéronef était entretenu en vertu d'un Programme d'entretien à opérations progressives, qui tolère un retard de 10 % ou un maximum de 5 heures de vol entre les inspections (pièce D2). Si toutefois une inspection tarde, l'inspection suivante doit être avancée d'autant. Pour rendre une décision quant aux chefs d'accusation 26 et 28 à 34 inclusivement, il faut tenir compte du fait que l'aéronef faisait l'objet d'un programme d'entretien à opérations progressives.

Le carnet de route du C-FAFC a été déposé comme pièces M16 et M17. Le présentateur du ministre des Transports et le conseiller du requérant ont convenu de ce que chaque entrée des pièces M16 et M17 expriment clairement l'information qu'elle contient. Ils ont aussi admis que la date de l'entrée se trouvant à la page 2000036 de la pièce M16, qui se lit 04-03-89, devrait se lire 04-04-89 et que la date de l'entrée de la page 2000037, qui se lit 05-03-89, devrait se lire 05-04-89.

  Heures inscrites 44,90  
  Chef d'accusation 2 (heures non inscrites)  2,07  
  Chef d'accusation 3 (heures non inscrites)  2,32  
  Chef d'accusation 4 (heures non inscrites)  2,25  
    -----  
  TOTAL 51,54  
    =====  

La pièce M17 commence en date du 27 janvier 1989, à 1692,2 heures de temps air, après une inspection.  L'inspection suivante doit donc avoir lieu au bout de 1692,2 plus 50 heures, soit 1742,2 heures de temps air.  Si on fait le total des heures inscrites et non-inscrites entre le 27 janvier et le 28 février 1989, on doit additionner 51,54 à 1692,20 ce qui donne 1743,74 heures de « temps air » pour le C-FAFC avant le 28 février 1989.  L'inspection de 50 heures est échue depuis 1,54 heure.  Toutefois, compte tenu du retard de 10 % ou de 5 heures de vol permis par le programme d'entretien à opérations progressives, l'aéronef est toujours en deçà des limites.  L'inspection suivante doit toutefois avoir lieu 1,54 heure plus tôt que prévu.  Le chef d'accusation 26 est donc rejeté.

Chef d'accusation 28 :

Le chef d'accusation 28 a trait à un vol effectué par le C-FAFC le 8 mars 1989.  La pièce M18, qui est le livret technique de l'aéronef, porte une entrée en date du 27 janvier 1989 attestant qu'une inspection de 50 heures a été faite à 1692,2 heures. L'inspection de 50 heures suivante doit donc avoir lieu à 1742,2. Toutefois, le carnet de route (pièce M17) comporte une entrée en date du 27 janvier 1989 montrant que la prochaine vérification de 100 heures doit avoir lieu à 1745,2 heures.  Le total des heures de vol du 27 janvier 1989 au dernier vol effectué le 8 mars 1989 est de 48,9 heures.  La pièce M37, cependant, montre un total de 6 heures non consignées.  Je conclus donc que le total des heures de vol consignées ou non pour le C-FAFC à la fin du vol effectué le 8 mars 1989 est de 54,9 heures.

  Heures consignées 48,90  
  Heures non consignées 6,00  
    -----  
  TOTAL 54,90  
    =====  

En vertu du programme d'entretien à opérations progressives, on doit ajouter au total des heures consignées, soit 48,90, le retard dont il est fait mention par rapport au chef d'accusation 26.  Le point de départ pour le chef d'accusation 28 est donc de 48,90 plus 1,54, soit 50,44 heures.  Si l'on ajoute à cela les 6 heures non inscrites, le nombre total d'heures est de 56,44, ce qui est plus que le maximum toléré en vertu du Programme d'entretien à opérations progressives. Le chef d'accusation 28 est donc établi.

Chef d'accusation 29 :

Le chef d'accusation 29 a trait à un vol effectué par le C-FAFC le 9 mars 1989.  Le temps air consigné au début de ce vol était de 48,9, plus les 6 heures non consignées mentionnées au regard du chef d'accusation 28, pour un total de 54,90 heures. Les témoignages établissent que le C-FAFC était à Weyburn (Saskatchewan) le 7 mars 1989.  La pièce M28, un reçu MasterCard, indique que cet aéronef a été avitaillé par l'East Air, à Weyburn (Saskatchewan), le 7 mars 1989.  Il n'y aucune entrée au carnet pour ce vol.  Le jour suivant, soit le 8 mars 1989, un reçu pour avitaillement de la Hudson General Flight Services, établi à l'aérodrome municipal d'Edmonton (pièce M26), montre que l'aéronef était de retour à Edmonton et porte la mention [traduction] Prêt à voler Estevan.

J'accepte le témoignage de Peggy Plonka selon lequel la durée raisonnable d'un vol Edmonton - Weyburn - Edmonton pour l'aéronef en question est de 6 heures.  On peut donc considérer que le total des heures inscrites ou non au regard du chef d'accusation 29 est de 60,9, donc 10,9 heures de plus que le temps au bout duquel l'inspection de 100 heures aurait dû avoir lieu.  Si l'on prend en considération le Programme d'entretien à opérations progressives, le nombre d'heures en trop est encore plus élevé.  Je conclus donc que le chef d'accusation 29 est établi.

Chef d'accusation 30 :

Le chef d'accusation 30 concerne un vol effectué le 18 mars 1989, entre Calgary et Edmonton.  Le carnet de route (pièce M17) fait état de ce vol, d'une durée d'une heure.  À ce stade, l'aéronef est en retard de 13,6 heures sur l'inspection de 100 heures.

  Heures inscrites 48,9  
  Heures non inscrites    
     (chefs d'accusation 28 et 29) 12,0  
  Vol du 18 mars 1989 1,0  
    ----  
  TOTAL 61,9  
    ====  

Je conclus donc que le chef d'accusation 30 est établi.

Chef d'accusation 31 :

Le chef d'accusation 31 a trait à un vol effectué le 19 mars 1989, près d'Edmonton (Alberta).  Le carnet de route (pièce M17) fait état du vol, d'une durée inscrite de 1,7 heure.  À ce stade, l'aéronef était en retard de 13,6 heures sur l'inspection de 100 heures.

  Heures inscrites 49,9  
  Heures non inscrites    
     (chefs d'accusation 28 et 29) 12,0  
  Vol du 19 mars 1989 1,7  
    ----  
  TOTAL 63,6  
    ====  

Je conclus donc que le chef d'accusation 31 est établi.

Chef d'accusation 32 :

Le chef d'accusation 32 a trait à un vol effectué le 20 mars 1989, à Edmonton (Alberta).  Le carnet de route (M17) fait état du vol, d'une durée inscrite de 1,0 heure.  À ce stade, l'aéronef était en retard de 14,6 heures sur l'inspection de 100 heures.

  Heures inscrites 51,6  
  Heures non inscrites    
     (chefs d'accusation 28 et 29) 12,0  
  Vol du 20 mars 1989 1,0  
    ----  
  TOTAL 64,6  
    ====  

Je conclus donc que le chef d'accusation 31 est établi.

Chef d'accusation 33a) :

Le chef d'accusation 33 a) a trait à un vol effectué le 23 avril 1989, entre Vancouver (C.-B.) et Invermere (C.-B.).  Le chef d'accusation a également trait à une allégation distincte voulant que la révision obligatoire des deux moteurs n'ait pas été faite à temps.  J'y reviendrai.  La pièce M18, soit le livret technique, montre que l'inspection de 100 heures a été effectuée le 21 mars 1989.  Les heures de vol consignées ou non entre le 27 janvier 1989 et le 20 mars 1989 (chefs d'accusation 26 et 28 à 32) se chiffrent à 64,6.  Un certificat d'inspection de 50 heures délivré le 27 janvier 1989 (pièce M18) montre un nombre d'heures total de 1692,2. Les heures de vol réelles en date du 21 mars 1989 sont donc de 1756,8.

  Pièce M18 - 27 janvier 1989    
         (nombre total d'heures) 1692,2  
  Total des heures consignées et    
         non consignées (27 janvier au    
         21 mars 1989, chefs d'accusation    
         26 et 28 à 32) 64,6  
    ------  
  TOTAL 1756,8  
    ======  

Le conseiller du requérant et le présentateur s'entendent sur le fait qu'entre le 22 mars 1989 et le 23 avril 1989, l'aéronef a accumulé 51 heures de vol consignées.  Cependant, 4 heures n'ont pas été consignées.

  Chef d'accusation 8 1,0  
  Chef d'accusation 9 1,0  
  Chef d'accusation 14 2,0  
      ---  
  TOTAL   4,0  
      ===  

Le total du temps air en date du 23 avril 1989 était donc de 1811,8.

  21 mars 1989 (total) 1756,8  
  Nombre convenu d'heures consignées entre    
         le 22 mars et le 23 avril 51,0  
  Heures non consignées 4,0  
    ------  
  TOTAL 1811,8  
    ======  

À ce stade, en ce qui a trait au chef d'accusation 33a), l'aéronef était en retard de 5 heures sur l'inspection de 50 heures.  Or, ces cinq heures respectent la limite des 10 % ou des 5 heures de vol tolérée en vertu du programme d'entretien à opérations progressives.  L'aéronef étant encore en deçà des limites, le chef d'accusation 33a) est rejeté.

Chef d'accusation 34a) :

Ce chef d'accusation a trait à un vol effectué le 24 avril 1989 ainsi qu'à une allégation distincte voulant que l'inspection obligatoire des deux moteurs n'ait pas eu lieu à temps.  Je reviendrai à cette deuxième allégation.

Le carnet de route (pièce M17) fait état d'un vol effectué le 24 avril 1989, d'une durée de 0,7 heure.  À ce stade, l'aéronef était en retard de 5,7 heures sur l'inspection de 50 heures. Toutefois, l'inspection devait en réalité avoir lieu 5 heures plus tôt, compte tenu du retard de 5 heures mentionné dans le chef d'accusation 33a).

  Total du temps air (chef d'accusation 33)    1811,8
  Vol du 24 avril 1989                                      0,7 
  TOTAL                                                           1812,5 

Je conclus donc que le chef d'accusation 34 a) est établi.

Chefs d'accusation 33 b) et 34 b) :

Les deux allégations ont trait à une violation présumée de l'article 210(1)a), l'aéronef ayant volé sans que soit effectuée la révision obligatoire des deux moteurs après 1800 heures de temps air.  J'ai évalué que le total du temps air, eu égard au chef d'accusation 33a), était de 1811,8 et de 1812,5 eu égard au chef d'accusation 33b).  Le temps d'utilisation des moteurs excède donc 1800 heures relativement aux deux chefs d'accusation.

Une lettre d'Avco Lycoming Service (pièce M40) établit à 1800 heures le temps avant révision pour les moteurs en question. Cependant, la lettre mentionne :

[Traduction] Les parties responsables de l'entretien du moteur peuvent attendre plus que le nombre d'heures précité, à moins d'une limite établie par la FAA. En outre, c'est aux parties responsables de l'entretien du moteur qu'il incombe de décider si le moteur peut fonctionner au-delà du nombre d'heures recommandé. Cette décision doit se fonder sur la connaissance du moteur et des conditions dans lesquelles il a été utilisé.

Le témoignage, en l'espèce, donne comme satisfaisants l'état et le fonctionnement des moteurs, au moment où ils ont été enlevés, après 1787 heures de vol consignées.  L'ingénieur en chef, John Williams, aurait donc pu prolonger le délai, compte tenu des heures consignées, mais il ne l'a pas fait. L'inspection des moteurs était donc en retard au moment où ont eu lieu les vols mentionnés eu égard aux chefs d'accusation 33b) et 34 b).  Ces chefs d'accusation sont donc établis.

Le ministre des Transports suppose que le défaut, par le requérant, de tenir les carnets de route avait pour but de prolonger le délai entre les inspections obligatoires.  La sécurité aérienne aurait donc été compromise.

Le requérant avance qu'une partie du problème est imputable à d'autres personnes sur lesquelles l'entreprise n'a aucune autorité.  Il invoque à cet égard la diligence raisonnable. David Robertson, agent principal des opérations pour le requérant, déclare que les vols visés par les chefs d'accusation 2, 3 et 4 ont eu lieu pendant le week-end et suppose que le pilote impliqué a utilisé l'aéronef sans permission.

M. Robertson mentionne que les vols visés par les chefs d'accusation 8 à 14 inclusivement ont eu lieu pendant que lui et son épouse (la présidente) étaient en vacances et que Al Kroontie, seul actionnaire d'une compagnie détenant 50 % des intérêts de la compagnie du requérant pouvait bien être celui qui avait utilisé l'aéronef. M. Kroontie a témoigné qu'il avait probablement utilisé l'avion et oublié de le noter dans le carnet.  Il n'y a cependant aucune entrée dans le carnet de vol de M. Kroontie depuis 1988.  En ce qui a trait au chef d'accusation 18, M. Robertson pense que le personnel d'entretien peut avoir exécuté un vol d'essai.

En ce qui touche le chef d'accusation 19, M. Robertson a déclaré que le requérant ne louait pas l'aéronef, mais que l'immatriculation pouvait ne pas avoir été changée par inadvertance.

Les chefs d'accusation 22 et 23 avaient trait à une excursion de ski offerte en promotion et n'engendrant pas de revenus, ce qui explique pourquoi il n'existe pas de facture qui permettrait une contre-vérification.

Les gestes visés par les chefs d'accusation 1, 5, 7, 15, 16, 17, 20 et 21 (8 au total) sont des erreurs non détectées par le système, au dire de M. Robertson.  Ces vols représenteraient environ 20 heures seulement, sur un total de 4000, probablement. Il considère le tout comme une marge d'erreur raisonnable.

M. Robertson laisse entendre également qu'une personne en veut au requérant et a saboté l'un de ses aéronefs.  Il semble en outre que le requérant ait éprouvé des difficultés avec un ancien employeur qui possède un Piper Seneca dont l'immatriculation comportait des lettres d'appel similaires au C-FAFC et que le personnel de la tour aurait pu se tromper dans l'enregistrement des mouvements de l'avion.  J'ai eu l'impression que M. Robertson suggérait en fait que l'ancien employeur pourrait avoir utilisé à dessein les lettres d'appel du Piper Seneca du requérant.  Je ne trouve pas ces allégations plausibles.

Le conseiller du requérant prétend que ce dernier s'est raisonnablement efforcé d'éviter de contrevenir au Règlement et invoque l'article 8.5 de la Loi sur l'aéronautique, qui énonce ce qui suit :

8.5 Nul ne peut être reconnu coupable d'avoir contrevenu à la présente partie ou à ses textes d'application s'il a pris toutes les mesures nécessaires pour s'y conformer.

Le conseiller a aussi attiré mon attention sur l'affaire ministre des Transports et Donald R. Fonger, dossiers nos C-0064-02 (TAC) et 6504-P140586-007386 MdT, ainsi que sur l'affaire Regina c. City of Sault Ste Marie, à laquelle le dossier Fonger fait allusion.

Je me rappelle également d'un commentaire de mon collègue, Ed Jenson qui, à l'audience initiale du dossier LaRonge Aviation Services Ltd. a souligné au passage la gravité de la suspension d'un certificat d'exploitation.

Le dossier ministre des Transports et Donald R. Fonger me paraît être une bonne interprétation de la Loi et j'accepte le principe qui veut que l'article 8.5 donne à l'intimé la possibilité de ne pas être tenu responsable d'une infraction s'il peut convaincre le Tribunal qu'il a fait preuve d'une prudence raisonnable afin d'empêcher l'infraction.

Dans le présent dossier, je dois examiner les témoignages et déterminer si le requérant a, en l'espèce, apporté le soin raisonnable qu'une personne raisonnable aurait apporté dans des circonstances semblables.

Les témoignages des divers témoins cités par le requérant à cet égard montrent que le requérant recourt aux services d'un agent de sécurité comme intermédiaire entre les pilotes de ligne et la direction.  Cet agent donne également des cours sur divers points de sécurité.  La compagnie a pour politique d'offrir aux nouveaux pilotes des séances d'initiation en vol avant de leur confier des vols réguliers.  Les pilotes sont incités à consigner tous leurs vols, si courts soient-ils. Les carnets sont confrontés aux fiches de la compagnie afin de vérifier si tous les vols ont été consignés.  C'est au pilote commandant de bord qu'il revient de veiller à ce que les entrées au carnet soient complètes.  En outre, selon le témoignage du requérant, on utilise aussi des films et des lettres, en plus de transmettre les recommandations des compagnies en ce qui a trait aux accidents.  Les nouveaux pilotes reçoivent une formation officielle au sol à bord des avions de la compagnie ainsi que des instructions sur les procédures normales et extraordinaires à suivre en cas d'urgence.  Une fois cette formation terminée, le nouveau pilote doit subir une épreuve d'aptitudes évaluée par un inspecteur du ministère des Transports.  Enfin, la compagnie a organisé un concours visant à récompenser les membres du personnel dont les carnets sont les plus exacts.

Dans le cas qui nous occupe, les infractions ont été commises entre le 30 octobre 1988 et le 24 avril 1989, soit une période de moins de 6 mois.  Quatre des chefs d'accusation ont été retirés et les chefs d'accusation 26 et 33a) ont été rejetés. Il reste cependant encore 29 chefs d'accusation, outre les 33b) et 34b), soit un total de 31 pour lesquels j'ai conclu à la culpabilité du requérant.  Une répartition donne environ 5 infractions par mois au cours de la période en cause.

Il me semble que si le système du requérant avait été efficace, les infractions ou tout au moins bon nombre d'entre elles, n'auraient pas été commises.

Aucun des témoignages qui m'ont été présentés ne donne à penser que le requérant a délibérément négligé la tenue des carnets de route de façon à prolonger le délai permis avant les vérifications obligatoires et il serait dangereux de tirer une telle conclusion des témoignages présentés.  Je conclus toutefois, étant donné le nombre d'infractions commises au cours d'une période de 6 mois, que le requérant n'a pas déployé tous les efforts nécessaires qu'une personne raisonnable aurait tentés dans les mêmes circonstances. L'article 8.5 ne peut donc être invoqué en l'espèce.

À la fin de la plaidoirie, j'ai prévenu le présentateur et le conseiller que s'ils souhaitaient traiter de l'amende, au cas où ma décision serait en faveur du ministre des Transports, j'écouterais volontiers leur plaidoirie, sans toutefois admettre de témoignages visant toute déclaration antérieure de culpabilité.  La présentation de tels témoignages à ce stade influerait sur ma décision et serait injuste envers le requérant. Nous avons alors examiné diverses méthodes permettant de traiter du montant de l'amende, y compris une téléconférence et la présentation d'une plaidoirie écrite.

Le conseiller du requérant, toutefois, préférait une représentation verbale et, compte tenu de la gravité de la suspension dans la perspective du requérant, j'admets qu'il n'y a aucune question de convenance qui tienne.

La présente audience sera donc convoquée à nouveau à Calgary (Alberta) pour traiter de l'amende, à une date et dans un lieu que doit établir le Tribunal.  Les deux parties seront avisées par écrit de la date et du lieu arrêtés.

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