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TRIBUNAL D’APPEL DES TRANSPORTS DU CANADA

Référence : Randell Kuan c. Canada (Ministre des Transports), 2021 TATCF 23 (révision)

No de dossier du TATC : P-4606-33

Secteur : aéronautique

ENTRE :

Randell Kuan, requérant

- et -

Canada (Ministre des Transports), intimé

[Traduction française officielle]

Audience :

Par vidéoconférence le 30 avril 2021

Affaire entendue par :

William Cottick, conseiller

Décision rendue le :

22 juillet 2021

DÉCISION ET MOTIFS À LA SUITE DE LA RÉVISION

Arrêt : Je confirme la conclusion du ministre des Transports selon laquelle le requérant a fait une inscription inexacte dans un dossier technique et a omis de dater cette inscription, contrevenant ainsi au paragraphe 605.93(1) du Règlement de l’aviation canadien. Je confirme en outre la sanction pécuniaire de 250 $ imposée par le ministre.

Le montant total de 250 $ est payable au receveur général du Canada et doit parvenir au Tribunal d’appel des transports du Canada dans les 35 jours suivant la signification de la présente décision.


I. HISTORIQUE

[1] Le 21 avril 2020, le ministre des Transports (ministre) a délivré au requérant un avis d’amende pour contravention, en vertu de l’article 7.7 de la Loi sur l’aéronautique (Loi). L’avis indiquait ce qui suit :

Le ou vers le 22 avril 2019, à l’aéroport de Boundary Bay (CZBB) (Colombie-Britannique) ou dans les environs, vous, Randell Kin Lap Kuan, avez fait une inscription inexacte dans le carnet de route d’un aéronef Cessna 172M portant l’immatriculation C-GWZB, à savoir que l’inscription indiquait qu’une vérification en vol avait été effectuée alors que ce n’était pas le cas, et avez également omis de consigner la date de l’inscription, contrevenant ainsi au paragraphe 605.93(1) du Règlement de l’aviation canadien.

Sanction pécuniaire imposée : 250,00 $

[2] Le 8 mai 2020, M. Kuan a demandé la révision de la sanction administrative pécuniaire (SAP) auprès du Tribunal d’appel des transports du Canada (TATC).

II. ANALYSE

A. Cadre juridique

[3] En vertu du paragraphe 7.7(1) de la Loi, le ministre peut imposer une sanction pécuniaire s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a contrevenu à un texte désigné.

[4] En l’espèce, le texte désigné est le paragraphe 605.93(1) du Règlement de l’aviation canadien (RAC), lequel prévoit ce qui suit :

Dossiers techniques — Généralités

605.93 (1) La personne qui effectue une inscription dans un dossier technique doit :

a) effectuer l’inscription de façon précise, lisible et permanente;

b) y inscrire son nom et y apposer sa signature ou son code d’identification ou, lorsque le dossier technique est tenu sur système de traitement électronique des données, y inscrire son code d’utilisateur ou sa désignation de sécurité équivalente;

c) consigner la date de l’inscription.

B. Circonstances ayant mené à l’imposition de la SAP

[5] M. Kuan est le propriétaire et l’exploitant de l’International Flight Centre Inc. (IFC), une école de formation au pilotage basée à l’aéroport de Boundary Bay. De plus, il y agit à titre d’instructeur de vol et de personne responsable de la maintenance (PRM). L’IFC n’avait pas la capacité d’effectuer les travaux d’entretien et de réparation de ses aéronefs et, par conséquent, retenait les services d’organismes de maintenance agréés (OMA) pour ce faire. En avril 2019, l’un des aéronefs de l’école de pilotage, le Cessna 172 immatriculé C-GWZB, nécessitait des travaux pour régler le problème d’un gyro directionnel (DG) hors d’usage, et M. Kuan a confié l’appareil à Canada West Avionics Ltd. (Canada West), un OMA situé à proximité de l’aéroport, pour qu’il effectue les travaux.

[6] Canada West a remplacé le DG hors d’usage par une pièce de rechange en bon état de service. Une fois les travaux terminés, Canada West a effectué une inscription datée du 22 avril 2019 dans le carnet de route de l’aéronef du C-GWZB. L’inscription décrivait le remplacement du DG, et comprenait l’énoncé suivant : « Bon état de service du DG de remplacement sous réserve d’une vérification en vol satisfaisante ».

[7] Informé que les travaux sur son appareil étaient terminés, M Kuan est allé le récupérer le 22 avril 2019. La preuve incontestée veut que M. Kuan ait par la suite fait une inscription dans le carnet de route de l’aéronef C-GWZB, face à l’inscription de Canada West sur la page immédiatement opposée, laquelle inscription indiquait ce qui suit : « Vérification en vol de l’aéronef est satisfaisante ». M. Kuan a apposé sa signature vis-à-vis cette inscription, y ajoutant son numéro de licence de pilote.

[8] Le carnet de route de l’aéronef C-GWZB est un dossier technique au sens des paragraphes 605.92(1) et 605.93(1) du RAC.

C. Y a-t-il eu une vérification en vol?

(1) Aperçu des événements

[9] Les deux parties ont présenté des éléments de preuve quant à ce qui s’est passé ou non relativement à la vérification de l’état de fonctionnement du DG après que M. Kuan eut récupéré l’aéronef C-GWZB le 22 avril 2019.

[10] Saied Namazi, un enquêteur chargé de l’application de la loi à l’Unité régionale de l’Application de la loi de l’Aviation civile de Transports Canada, a témoigné au nom du ministre. M. Namazi est un technicien breveté d’entretien d’aéronef (TEA) ayant accumulé 12 ans d’expérience à Transports Canada (TC), après avoir travaillé pendant 21 ans dans l’industrie aéronautique. J’estime que M. Namazi est un témoin crédible.

[11] Au cours d’une visite de surveillance accrue effectuée le 2 juillet 2019 par deux inspecteurs de TC aux bureaux de l’IFC à l’aéroport de Boundary Bay, ceux-ci ont constaté de visu l’inscription relative à la vérification en vol faite par M. Kuan dans le carnet de route de l’appareil C-GWZB, mais n’ont vu aucune inscription quant au temps dans les airs ou toute autre inscription correspondant à la « vérification en vol ». M. Kuan a d’abord dit aux inspecteurs de TC qu’il avait effectué une véritable vérification en vol, que ce vol d’environ six minutes avait consisté en un circuit à l’aéroport de Boundary Bay, et qu’il n’avait pas inscrit les détails du vol dans le carnet de route de l’avion C-GWZB parce qu’il avait été distrait par un étudiant présent dans son bureau au moment où il effectuait l’inscription.

[12] Au terme de la visite des lieux, le 2 juillet, M. Kuan s’est vu remettre une lettre de notification l’informant d’un défaut ou d’une lacune concernant son inscription relative à la vérification en vol, car « aucune information de vol n’a été consignée ».

[13] M. Kuan a répondu à la lettre de notification le 2 juillet 2019 en déclarant ce qui suit :

La vérification en vol de l’aéronef pour le DG a été effectuée le 22/04/2019 et le vol n’a pas été inscrit dans le carnet de route, vraisemblablement en raison d’une interruption pendant que j’inscrivais les informations sur la vérification en vol du DG dans le carnet de route. J’ai mis les informations relatives à la vérification en vol du DG à côté du travail effectué par Canada West Avionics, et je pensais mettre le vol sur la page suivante. D’une manière ou d’une autre, avec l’interruption, j’ai oublié d’inscrire le vol dans le carnet de route.

[14] Le 19 août 2019, M. Namazi a envoyé une lettre d’enquête à M. Kuan l’informant que TC enquêtait sur une violation possible du paragraphe 605.93(1) du RAC.

[15] Dans le cadre de l’enquête, M. Namazi a interviewé M. Kuan au téléphone le 6 septembre 2019, et une transcription de cette entrevue a été jointe à la pièce M-3A. Au cours de l’entrevue, M. Kuan a déclaré qu’il avait vérifié le DG pendant qu’il circulait au sol à bord de l’appareil C-GWZB, à partir des installations de Canada West jusqu’à l’endroit où il gare normalement l’aéronef près des bureaux de l’IFC.

[16] M. Kuan a également reconnu durant cette entrevue qu’il avait dit aux inspecteurs de TC, le 2 juillet 2019, qu’afin de vérifier le DG, il avait pris le C-GWZB « en haut pour un vol ».

[17] Toujours dans le cadre de la même entrevue, M. Kuan a indiqué que lorsqu’il a récupéré l’avion, il n’avait pas son équipement de vol avec lui, comme son casque d’écoute, de sorte qu’il n’était pas allé voler. Il a déclaré : « Ce que j’ai fait, c’est que j’ai vérifié les instruments au sol pendant que je roulais ».

[18] Dans son témoignage à l’audience en révision, M. Kuan a de nouveau modifié quelque peu son récit, en disant qu’après avoir appris à son arrivée initiale aux installations de Canada West qu’une vérification en vol était nécessaire, il s’était rendu à son bureau pour prendre son casque d’écoute avant de retourner chez Canada West afin de récupérer l’aéronef C-GWZB pour effectuer la vérification en vol. Il a déclaré qu’il avait d’abord l’intention de vérifier le DG en effectuant une véritable vérification en vol « aérien », mais qu’il avait par la suite changé d’idée parce qu’il avait décidé qu’il pourrait vérifier le bon état de service du DG en comparant ses lectures à celles du compas magnétique de l’avion pendant qu’il circulerait au sol pour rapporter le C-GWZB dans son espace de stationnement habituel.

[19] M. Kuan a témoigné qu’il n’avait pas monté à bord de l’appareil C-GWZB pour effectuer une vérification en vol aérien le 22 avril 2019, et qu’il n’avait pas non plus demandé ou reçu une autorisation de circuler ou un code de transpondeur afin de décoller de l’aéroport de Boundary Bay pour effectuer une vérification en vol ce jour-là.

[20] À plusieurs reprises durant son témoignage à l’audience, M. Kuan a indiqué qu’en raison des traitements médicaux qu’il avait subis et des médicaments connexes qu’il avait pris, il avait eu, à divers moments, des problèmes de mémoire en rapport aux questions faisant l’objet de la présente audience, mais qu’à chaque fois, il s’était par la suite souvenu plus précisément de ce qui s’était réellement passé.

[21] En fonction de la preuve présentée à l’audience, je tire les conclusions de fait suivantes :

  1. Après que M. Kuan a récupéré l’avion C-GWZB chez Canada West le 22 avril 2019, il a roulé à bord de l’appareil jusqu’à son espace de stationnement près des installations de l’IFC.
  2. Pendant qu’il circulait au sol, il a vérifié la fonctionnalité du DG en comparant ses lectures à celles du compas magnétique de l’aéronef.
  3. M. Kuan n’a pas effectué de vol aérien à bord de l’aéronef C-GWZB ce jour-là.
  4. M. Kuan n’a pas demandé ou reçu d’autorisation de circuler au sol pour se rendre à la piste afin de décoller et d’effectuer une vérification en vol aérien pour vérifier le bon état de service du DG installé sur l’appareil C-GWZB, ni demandé ou reçu de code de transpondeur en vue de décoller de l’aéroport de Boundary Bay le 22 avril 2019, après avoir récupéré l’aéronef.
  5. Si M. Kuan avait initialement l’intention d’effectuer une vérification en vol aérien ou un vol d’essai à bord de l’aéronef C-GWZB lorsqu’il a récupéré ce dernier chez Canada West, il a par la suite abandonné cette intention.

(2) Sens des termes « vol » et « vérification en vol »

[22] Au cours de l’audience relative à la présente affaire, il est devenu évident qu’un point de désaccord majeur entre les parties était le sens de l’expression « vérification en vol » apparaissant dans la certification après maintenance conditionnelle inscrite par Canada West dans le carnet de route de l’aéronef C-GWZB, et la question de savoir si les mesures prises par M. Kuan constituaient une vérification en vol.

[23] La Loi et le RAC ne contiennent pas de définition explicite des termes « vol », « vérification en vol » ou « vol d’essai ».

[24] Dans le cadre de sa preuve, le ministre a proposé de déposer au dossier, par l’entremise du témoignage de M. Namazi, des extraits de l’ouvrage The Aviation Dictionary for Pilots and Aviation Maintenance Technicians (dictionnaire de l’aviation Jeppesen), publié en 2012, par Jeppesen Sanderson Inc. Les extraits pertinents sont les définitions suivantes:

[traduction]

vol 1. Voyage dans les airs. Un aéronef est considéré comme étant en vol à partir du moment où il quitte le sol jusqu’à ce qu’il atterrisse. […]

vérification en vol Un vol d’essai servant à vérifier les performances d’un aéronef après des réparations ou des travaux majeurs.

[25] M. Namazi a déclaré qu’il s’agissait là d’une des nombreuses publications disponibles comme source de référence pour le personnel de l’aviation au Canada, et qu’il s’y était lui-même référé de temps à autre en sa qualité de TEA et d’enquêteur de TC.

[26] M. Kuan s’est opposé au dépôt en preuve des extraits du dictionnaire, et à toute utilisation des définitions, faisant valoir qu’ils provenaient d’une publication américaine qui n’avait aucune pertinence au Canada et que, de toute façon, le sens des définitions mentionnées dans les extraits devrait être déterminé en fonction de la Loi et du RAC, en particulier en fonction de la définition du terme « temps de vol » contenue au RAC.

[27] Après avoir entendu les arguments des parties, j’ai accepté que les extraits du dictionnaire de l’aviation Jeppesen soient déposés au dossier de la preuve sous la cote M-12, avisant du même coup les parties que je tiendrais compte, dans ma décision, de leurs arguments afin de déterminer la valeur probante, le cas échéant, à accorder au document et à son contenu. En fin de compte, j’ai considéré les définitions en l’espèce, mais je ne les ai pas jugées déterminantes, bien qu’elles aient été d’une aide limitée dans ma prise de décision.

[28] Le ministre a par ailleurs fait valoir que le sens ordinaire de l’expression « sous réserve d’une vérification en vol satisfaisante », telle qu’inscrite par Canada West dans le carnet de route de l’aéronef C-GWZB, exigeait qu’un véritable vol aérien ait lieu et que la vérification de la fonctionnalité du DG se déroule au cours de ce vol.

[29] M. Kuan a témoigné qu’à son avis, une vérification en vol pouvait avoir lieu au sol pendant le roulage, même si à aucun moment l’aéronef ne quittait le sol, fondant cette interprétation sur la définition de « temps de vol » dans le RAC. La définition de « temps de vol » à l’article 101.01 du RAC se lit comme suit :

temps de vol Le temps calculé à partir du moment où l’aéronef commence à se déplacer par ses propres moyens en vue du décollage jusqu’au moment où il s’immobilise à la fin du vol.

[30] M. Kuan a déclaré qu’il comprenait de cette définition que le temps de roulage au sol au cours duquel il a vérifié le fonctionnement du DG pouvait constituer un « vol » au sens de l’expression « vérification en vol ». Il a affirmé que lorsqu’il avait récupéré l’aéronef C-GWZB, il avait d’abord l’intention de décoller pour effectuer un vol aérien, mais qu’il avait changé d’idée en décidant qu’il pouvait tout aussi bien vérifier la fonctionnalité du DG pendant le roulage.

[31] Je suis en désaccord avec l’interprétation de M. Kuan du terme « vol » dans le contexte de la situation factuelle en l’espèce. Le « temps de vol » n’est pas défini dans le RAC en lien avec la signification d’un vol d’essai ou d’une vérification en vol, mais à d’autres fins. Je conclus que le sens ordinaire de l’expression « sous réserve d’une vérification en vol satisfaisante », utilisée par le TEA de Canada West qui a inscrit la certification après maintenance conditionnelle de l’appareil C-GWZB, exigeait que le DG ait été vérifié au cours d’un vol durant lequel l’aéronef s’est envolé et est retourné au sol pour atterrir, même si une partie de la vérification du bon fonctionnement de l’instrument pouvait avoir lieu avant le véritable décollage du sol.

[32] Dans mon interprétation des dispositions de la Loi et du RAC, j’ai été guidé par le principe général d’interprétation des lois exprimé par l’auteur juridique Elmer Driedger, connu sous le nom de principe moderne, lequel a été approuvé par la Cour suprême du Canada et appliqué dans de nombreuses décisions :

Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution: il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur. (Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, par. 20-21; Medovarski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] 2 R.C.S. 539, par. 8; British Columbia Human Rights Tribunal c. Schrenk, [2017] 2 R.C.S. 795, par. 30)

J’ai particulièrement tenu compte du thème général de la promotion de la sécurité aérienne qui se dégage de l’ensemble de la Loi et du RAC.

[33] En ce qui concerne le point précis de désaccord entre les parties quant à la signification du terme « vol », en particulier tel qu’il est utilisé dans l’expression « vérification en vol », j’ai tenu compte des définitions du dictionnaire de l’aviation Jeppesen susmentionné, mais j’ai également examiné et pris en compte le sens ordinaire du mot « vol » tel que défini dans l’Oxford English Dictionary (troisième édition, août 2010; mise à jour de mars 2021 de la version en ligne) :

[traduction]

vol

a. L’action ou la façon de voler ou de se déplacer dans les airs avec ou comme avec des ailes ….

[…]

f. L’action ou la technique consistant à voyager dans les airs ou dans l’espace à bord d’un aéronef ou d’un engin spatial ou d’un ballon; le mouvement dans l’air ou l’espace d’un tel appareil.

[34] En outre, j’ai considéré les dispositions du paragraphe 571.10(4) et de l’article 605.85 du RAC qui, lues conjointement, prévoient un vol aérien et disposent que :

571.10 (4) Lorsqu’une personne signe une certification après maintenance relativement à des travaux de maintenance dont l’achèvement satisfaisant ne peut être assuré au moyen d’une inspection ou d’un essai au sol de l’aéronef sur lequel les travaux ont été exécutés, la certification après maintenance doit être conditionnelle à l’exécution satisfaisante d’un vol d’essai effectué conformément aux paragraphes 605.85(2) et (3), par l’ajout de la mention « sous réserve d’un vol d’essai satisfaisant ». [je souligne]

[…]

605.85 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), il est interdit à toute personne d’effectuer le décollage d’un aéronef dont elle a la garde et la responsabilité légales ou de permettre à toute personne d’effectuer un tel décollage lorsque l’aéronef a été soumis à un travail de maintenance, à moins que ce travail n’ait été certifié au moyen d’une certification après maintenance signée conformément à l’article 571.10.

(2) Lorsqu’un aéronef doit réussir un vol d’essai pour obtenir une certification après maintenance en application du paragraphe 571.10(4), il peut être utilisé à cette fin pourvu que seuls soient transportés à bord les membres d’équipage de conduite et les personnes nécessaires pour noter les observations essentielles au vol d’essai.

(3) À la suite d’un vol d’essai effectué en application du paragraphe (2), le commandant de bord de l’aéronef doit inscrire les résultats du vol d’essai dans le carnet de route et, lorsque l’inscription indique que les résultats du vol d’essai sont satisfaisants, cette inscription termine le processus de la certification après maintenance exigée en application du paragraphe (1).

[…]

[35] Je constate que les paragraphes 571.10(4) et 605.85(1) du RAC font mention des termes « vol d’essai » et « test en vol », et que les inscriptions dans le carnet de route de l’appareil C-GWZB contiennent l’expression « vérification en vol ». J’interprète le sens ordinaire de l’expression « vérification en vol », telle qu’elle est utilisée dans le carnet de route de l’aéronef C-GWZB, comme étant un vol aérien comportant une vérification ou un essai de la fonctionnalité du DG et, aux fins pertinentes en l’espèce, comme étant l’équivalent d’un « vol d’essai » au sens du RAC.

(3) Conclusion

[36] Au cours de l’audience, on a présenté des éléments de preuve voulant qu’il eût été possible de vérifier la fonctionnalité du DG au sol sans effectuer une vérification dans le cadre d’un vol aérien, une fois que le moteur de l’aéronef était en marche, mais ce n’est pas le processus choisi par le TEA qui a inscrit la certification après maintenance conditionnelle dans le carnet de route. Une fois que la condition exigeant une vérification en vol a été inscrite, M. Kuan n’avait d’autre choix pour y satisfaire que d’effectuer une vérification pendant un vol aérien ou de demander que la condition soit modifiée de façon appropriée par le TEA qui l’avait inscrite. Il n’était pas loisible à M. Kuan, qui n’est pas TEA, de substituer sa propre méthode de vérification de la fonctionnalité du DG à celle du TEA.

[37] J’en viens donc à la conclusion que l’inscription « Vérification en vol de l’aéronef est satisfaisante » est inexacte, car aucun vol comportant un décollage et un atterrissage de l’aéronef C-GWZB n’a eu lieu le 22 avril 2019, dans le but de vérifier ou de tester le bon état de service du DG.

[38] Même si M. Kuan avait initialement l’intention d’effectuer une vérification en vol aérien à bord de l’aéronef lorsqu’il a récupéré l’avion C-GWZB chez Canada West, il a par la suite abandonné cette intention et, de ce fait, les mesures qu’il a prises ne satisfont pas à sa propre interprétation des termes « vol » ou « vérification en vol », car elles n’ont pas été prises pendant le « temps calculé à partir du moment où l’aéronef commence à se déplacer par ses propres moyens en vue du décollage jusqu’au moment où il s’immobilise à la fin du vol ». Le roulage de l’aéronef C-GWZB jusqu’à son espace de stationnement n’avait pas pour but de décoller, et aucun vol aérien n’a été effectué. Par conséquent, même en adoptant l’interprétation de M. Kuan avec laquelle je suis en désaccord, aucune vérification en vol n’a eu lieu.

D. M. Kuan a-t-il daté son inscription dans le carnet de route?

[39] Le ministre a présenté des éléments de preuve selon lesquels aucune date n’était inscrite sur la même page à côté ou près de l’inscription de M. Kuan dans le carnet de route du C-GWZB : « Vérification en vol de l’aéronef est satisfaisante. »

[40] M. Kuan a reconnu qu’il n’avait pas inclus la date de son inscription, mais soutient qu’il a effectué cette inscription le 22 avril 2019, sur la page opposée et face à l’inscription de la certification après maintenance conditionnelle faite le même jour par Canada West. Selon lui, il devrait être évident que son inscription est liée à celle de Canada West.

[41] Je conclus que l’inscription de M. Kuan est séparée et distincte de celle effectuée par Canada West et devrait donc elle-même être datée afin que le dossier technique indique clairement à quel moment cette inscription a été faite. Dans le cas d’une certification après maintenance conditionnelle, il est important, pour des raisons de sécurité, que toute personne lisant le carnet de route de l’aéronef soit en mesure de vérifier avec certitude si, quand et comment la condition d’une telle certification après maintenance a été remplie. Je conclus que M. Kuan a omis de dater son inscription comme l’exige le paragraphe 605.93(1) du RAC.

E. Sanction pécuniaire

[42] M. Namazi a indiqué dans son témoignage que la sanction pécuniaire imposée en l’espèce avait été déterminée en fonction du montant minimum suggéré par le barème des sanctions de TC pour une première infraction commise par une personne contrevenant au paragraphe 605.93(1) du RAC, et qu’elle était bien inférieure à la sanction pécuniaire maximale de 1 000 $ prévue par le RAC pour une telle infraction commise par une personne. Il ne s’agit pas d’une sanction obligatoire, mais elle fait partie d’un éventail de sanctions pécuniaires suggérées en cas de contravention à la disposition. Bien que je ne sois pas lié par les amendes suggérées dans le barème des sanctions de TC, celui-ci est utile pour le maintien d’une certaine uniformité entre les sanctions imposées par le ministre pour des contraventions à diverses dispositions du RAC, et les divers niveaux de gravité et de répétitivité de ces contraventions.

[43] Je conclus que la sanction pécuniaire de 250 $ imposée en l’espèce est raisonnable dans les circonstances. Il s’agit de la sanction pécuniaire minimale généralement appliquée pour une première infraction en vertu de ce paragraphe du RAC.

III. DÉCISION

[44] Je confirme la conclusion du ministre des Transports selon laquelle le requérant a fait une inscription inexacte dans un dossier technique et a omis de dater cette inscription, contrevenant ainsi au paragraphe 605.93(1) du Règlement de l’aviation canadien. Je confirme en outre la sanction pécuniaire de 250 $ imposée par le ministre.

[45] Le montant total de 250 $ est payable au receveur général du Canada et doit parvenir au Tribunal d’appel des transports du Canada dans les 35 jours suivant la signification de la présente décision.

Le 22 juillet 2021

(Original signé)

William Cottick

Conseiller

Comparutions

Pour le ministre :

John Lindsay

Pour le requérant :

se représentant seul

 

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