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Référence : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada (Ministre des Transports), 2022 TATCF 48 (décision interlocutoire)

No de dossier du TATC : RQ-0069-41

Secteur : ferroviaire

ENTRE :

Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, requérante

- et -

Canada (Ministre des Transports), intimé

Audience :

Par observations écrites le 12 et le 26 avril et le 3 mai 2022

Affaire entendue par :

George « Ron » Ashley, conseiller

Décision rendue le :

Le 4 octobre 2022

DÉCISION INTERLOCUTOIRE ET MOTIFS

Arrêt : La demande de révision tardive est accueillie. Le Tribunal organisera une conférence préparatoire afin de discuter de la planification de l’audience.


I. HISTORIQUE

[1] Transports Canada a fait parvenir un procès-verbal en date du 28 janvier 2022 à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), y alléguant que le CN avait contrevenu au paragraphe 97(2) du Règlement sur les passages à niveau. Le procès-verbal, envoyé au service des Affaires juridiques du CN par courriel le même jour, indiquait que la violation entraînait une sanction administrative pécuniaire de 125 332 $. Le procès-verbal précisait que le CN avait le droit de contester l’allégation en déposant une demande de révision auprès du Tribunal d’appel des transports du Canada (Tribunal) au plus tard le 2 mars 2022.

[2] Le 29 mars 2022, soit 27 jours après la date limite de dépôt de toute demande de révision, le représentant du CN s’est adressé au Tribunal pour que la compagnie obtienne la permission de déposer une demande de révision du procès-verbal.

[3] À la réception de la demande du CN, le Tribunal a avisé les deux parties que, conformément à sa Politique relative aux demandes tardives, il accepterait leurs observations sur la question de l’octroi d’un délai pour le dépôt d’une demande de révision. La requérante a soumis ses observations à l’appui de sa demande le 12 avril 2022. Le représentant du ministre des Transports (ministre) a déposé des observations s’opposant à la demande le 26 avril 2022, puis, le 3 mai 2022, la requérante a soumis sa réplique finale.

II. ANALYSE

A. Le pouvoir discrétionnaire du Tribunal de proroger le délai de dépôt d’une demande de révision

[4] Le paragraphe 40.16(1) de la Loi sur la sécurité ferroviaire permet au destinataire d’un procès-verbal de demander une révision de la décision du ministre et, lorsque le délai pour le dépôt de cette requête en révision est expiré, de demander au Tribunal la permission de dépasser ce délai pour le dépôt de sa requête. Le paragraphe 40.16(1) dispose que :

Requête en révision

40.16 (1) Le destinataire du procès-verbal qui veut faire réviser la décision du ministre à l’égard des faits reprochés ou du montant de la pénalité dépose une requête auprès du Tribunal, au plus tard à la date limite qui y est indiquée, ou dans le délai supérieur éventuellement accordé à sa demande par le Tribunal.

[5] La Politique relative aux demandes tardives du Tribunal offre le cadre d’examen des demandes tardives. Elle prévoit, entre autres, qu’une demande est généralement acceptée lorsqu’elle est reçue dans les quatre jours ouvrables suivant la date limite. Si le Tribunal reçoit une demande de révision cinq jours ouvrables ou plus après l’échéance, les parties doivent alors soumettre des observations concernant la requête tardive. Le Tribunal examine ces observations et détermine si le demandeur a établi que des circonstances atténuantes justifient son défaut de demander une révision dans le délai précisé dans le procès-verbal.

B. Le Tribunal devrait-il faire droit à la demande de révision tardive présentée par la requérante?

[6] La requérante ne conteste pas le fait que l’échéance n’a pas été respectée ou qu’elle a dépassé le délai de grâce de quatre jours ouvrables prévu dans la Politique relative aux demandes tardives du Tribunal. Elle plaide plutôt l’existence de circonstances atténuantes et, du même coup, s’appuie sur les critères énoncés dans une décision récente de la Cour fédérale. Cet arrêt, Cyr c. Première Nation Batchewana, 2020 CF 1001 (Cyr), énonce les considérations suivantes lorsqu’il s’agit d’examiner la pertinence d’un retard dans le dépôt de la demande, en vertu de la Loi sur les Cours fédérales :

[41] Les prorogations au titre du paragraphe 18.1(2) sont discrétionnaires; la Cour les accorde lorsqu’elles sont dans l’intérêt de la justice. Une fois une demande de contrôle judiciaire présentée, par un ou plusieurs demandeurs, quatre questions guident l’enquête de la Cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire :

1. Le demandeur a‑t‑il manifesté une intention constante de poursuivre sa demande?

2. La demande a‑t‑elle un certain fondement?

3. Le défendeur subit‑il un préjudice en raison du retard?

4. Le demandeur a‑t‑il une explication raisonnable pour justifier le retard?

Se reporter aux arrêts Thompson c Canada (Procureur général), 2018 CAF 212 au para 5; Wenham c Canada (Procureur général), 2018 CAF 199 au para 42; Canada (Procureur général) c Larkman, 2012 CAF 204 au para 61.

[42] L’importance de chacun de ces quatre facteurs dépend des circonstances propres à chaque affaire. De plus, il n’est pas nécessaire que chacun de ces quatre facteurs soit en faveur du demandeur. Le poids élevé d’un facteur peut compenser la moindre importance d’un autre. La considération primordiale est celle de savoir si l’octroi d’une prorogation serait dans l’intérêt de la justice : Larkman, au para 63; Thompson, au para 9.

[7] Le représentant du ministre soutient également qu’il s’agit de la norme que le Tribunal doit utiliser pour statuer sur de telles demandes.

[8] Le Tribunal est du même avis. La Politique relative aux demandes tardives du Tribunal est axée sur l’existence de circonstances atténuantes. Fondamentalement, elle repose sur la considération primordiale que, tout compte fait, les intérêts de la justice sont servis par l’octroi d’une prorogation. Pour faciliter cette décision, le Tribunal adopte les quatre critères énoncés dans l’arrêt Cyr.

[9] Dans l’évaluation qui suit, le Tribunal examine chacun des facteurs dans l’ordre où ils sont présentés dans Cyr. Rappelons que ce faisant, nous gardons à l’esprit que la question fondamentale à laquelle le Tribunal doit répondre est de savoir si les intérêts de la justice sont servis par l’octroi d’une prorogation.

(1) Le demandeur a‑t‑il manifesté une intention constante de poursuivre sa demande?

[10] La requérante affirme avoir communiqué au ministre son intention de demander une révision du procès-verbal dès sa première réception. En effet, la requérante a reçu le procès-verbal dans un courriel daté du 28 janvier 2022, et a communiqué avec le ministre par courriel le même jour, pour lui manifester son l’intention d’en demander la révision.

[11] La requérante fait valoir que la déclaration contenue dans sa réponse par courriel était sans équivoque, que ses intentions n’ont pas changé au cours de la période qui a suivi et que, pour des raisons « hors du contrôle de CN … CN n’a pu respecter le Délai ». Par conséquent, il n’y a pas eu de suivi en temps opportun.

[12] C’est le 23 mars 2022, soit trois semaines après l’expiration du délai, que la requérante s’est vue rappeler l’existence du procès-verbal et du délai en recevant une demande de renseignements par courriel provenant du ministre. Le courriel du ministre visait à obtenir des renseignements sur le paiement par le CN de la sanction administrative pécuniaire prévue dans le procès-verbal.

[13] La requérante a expliqué qu’elle n’avait pu respecter la date limite en raison du volume élevé de dossiers que son équipe juridique interne devait gérer, et qu’au moment où il a pris connaissance de l’affaire, le conseiller juridique du CN a immédiatement contacté un cabinet d’avocats externe pour obtenir de l’aide. Aussi, le 24 mars 2022, le CN a confié le traitement de toutes ses affaires juridiques en cours à Dentons Canada, après quoi le cabinet d’avocats a avisé le Tribunal qu’une prorogation de délai serait demandée en l’espèce. C’est ce qui a été fait dans un courriel envoyé par un conseiller juridique de Dentons Canada en date du 29 mars 2022.

[14] La requérante admet qu’il n’y a pas eu d’autre communication avec le ministre dans l’intervalle. Selon la requérante, une conclusion peut néanmoins être tirée du non-paiement de la sanction pendant l’intervalle. En fait, la requérante infère que l’intention de demander une révision du procès-verbal était manifeste du fait du non-paiement de l’amende pendant cette période.

[15] Le représentant du ministre est d’avis contraire, arguant qu’il n’y avait pas d’intention véritable ou manifeste de demander une révision pendant la période en cause. Il soutient qu’un simple courriel de quelques lignes rédigé par un parajuriste du service des Affaires juridiques du CN et envoyé au ministre quatre heures après la réception initiale du procès-verbal ne démontre ni une ni l’autre.

[16] Le représentant du ministre ajoute qu’il n’y a pas de preuve prima facie en faveur des prétentions de la requérante. Notamment, le non-paiement de l’amende ne permet pas de conclure à l’existence d’une intention constante de demander une révision. Au contraire, cela démontre simplement que la requérante avait oublié le procès-verbal et la sanction.

[17] Le Tribunal conclut que, bien qu’il y ait eu une intention initiale déclarée de demander une révision, laquelle fut rédigée par un représentant avisé et autorisé du CN (courriel du CN daté du 28 janvier 2022 et envoyé à Transports Canada), le dossier a tout simplement été négligé par le service des Affaires juridiques du CN jusqu’à ce que Transports Canada envoie une demande de suivi le 23 mars 2022. Il a malgré tout fallu attendre jusqu’au 29 mars 2022 avant que le représentant désigné du CN confirme son intention de demander une révision du procès-verbal.

[18] Le non-paiement de l’amende au cours de cette période est tout aussi en cohérence avec un manque de surveillance qu’avec une intention constante de demander une révision. D’une façon ou d’une autre, je ne vois pas là la preuve d’une intention manifeste ou réelle. Une chose est certaine, l’absence de surveillance en l’espèce ne permet pas de conclure de manière convaincante à l’existence d’une intention constante de demander une révision au cours de la période suivant la déclaration initiale du 28 janvier 2022.

(2) La demande a-t-elle un certain fondement?

[19] La requérante affirme que sa défense à l’égard du procès-verbal est réelle et substantielle, et qu’elle établira que le CN a fait preuve de diligence pour maintenir sa conformité aux exigences énoncées au paragraphe 97(2) du Règlement sur les passages à niveau.

[20] En fonction des faits allégués et des circonstances générales de la présente affaire, la requérante soutient que sa preuve établira que le CN porte une attention primordiale de tous les instants à la sécurité ferroviaire et à la formation de ses employés. Le représentant du CN précise plus particulièrement que l’infraction alléguée en l’espèce concerne la sécurité ferroviaire à un passage à niveau, et qu’elle est fondée sur des allégations de fautes commises dans le cadre d’activités ferroviaires. Or, selon lui, ces allégations vont directement à l’encontre des valeurs fondamentales de la compagnie en matière de sécurité et, à ce titre, elles doivent être et seront contrées par la défense du CN.

[21] En outre, le représentant du CN soutient que si le bien-fondé de sa défense ne mérite pas de provoquer un débat valable dans le cadre d’une révision devant le Tribunal, le montant de l’amende le justifie à lui seul. En fait, la requérante estime que la sanction est sévèrement et grossièrement exagérée.

[22] D’opinion contraire, le représentant du ministre affirme que les prétentions du CN quant à sa diligence raisonnable sont générales, vagues et sans fondement. Celles-ci ne respectent manifestement pas l’exigence de preuve prima facie requis par la loi, soit de démontrer qu’il existe à tout le moins un fondement possible à cette défense.

[23] Le ministre soutient essentiellement qu’à ce stade, le CN doit présenter des éléments de preuve plus précis pour démontrer qu’il a agi avec diligence, et qu’en l’absence de cette preuve, le Tribunal ne saurait déterminer s’il existe une défense réelle et substantielle à l’égard du procès-verbal. De l’avis du ministre, comme cette demande de prorogation comporte plus de questions que de réponses, les motifs présentés par le CN ne démontrent pas clairement que la cause est suffisamment fondée.

[24] La requérante conteste ce dernier point, déclarant que l’audience en révision est le forum conveniens pour la présentation d’éléments de preuve détaillés relatifs à sa défense de diligence raisonnable. À l’étape interlocutoire, le Tribunal doit déterminer si une prorogation du délai (pour déposer une demande de révision) est justifiée, et il n’y a alors pas lieu d’entreprendre une évaluation complète du bien-fondé de la défense. Cette tâche revient au Tribunal dans le cadre de l’audition de la demande de révision.

[25] Je conclus que les affirmations de la requérante concernant sa culture de sécurité globale relativement à la sûreté des passages à niveau et à la formation des employés, ainsi que la preuve qu’elle a l’intention de présenter afin de démontrer comment cette culture constitue un moyen de défense crédible en matière de diligence raisonnable justifient que cette affaire puisse être entendue lors d’une audience en révision.

[26] Au stade interlocutoire, j’estime qu’il n’est pas nécessaire que la requérante établisse prima facie qu’elle a fait preuve de diligence raisonnable. Les questions soulevées par la requérante dans la présente requête, bien que de nature générale, démontrent que la défense envisagée n’est pas frivole. Elle révèle une question substantielle pouvant faire l’objet d’un débat.

(3) Le défendeur subit-il un préjudice en raison du retard?

[27] La requérante fait valoir que si une prorogation était accordée, le ministre se trouverait dans la même situation qu’il aurait été si le délai avait été respecté d’emblée. Par conséquent, le ministre ne souffrirait d’aucune perte d’avantage ni d’aucun désavantage découlant d’une prorogation. En somme, la requérante affirme que le fait de pouvoir exercer ses droits fondamentaux en vertu de la loi (dans le cadre d’une audience en révision) ne porte pas préjudice au ministre.

[28] De plus, la requérante soutient qu’il incombe au ministre d’établir les allégations énoncées dans un procès-verbal, et que cela se fait lors d’une audience en révision. En l’absence une telle audience, la requérante se verrait refuser la possibilité d’être entendue, ce qui violait le principe juridique audi alteram partem. Cette règle est un aspect fondamental de la justice naturelle, et elle ne peut être écartée en faveur de ce que la requérante qualifie de « raccourcis procéduraux » découlant du dépassement du délai de dépôt d’une demande de révision.

[29] En somme, la requérante avance que les prorogations sont expressément prévues au paragraphe 40.16(1) de la Loi sur la sécurité ferroviaire et qu’il n’y a rien de fâcheux à ce qu’elle cherche à se prévaloir de cette disposition. Aussi, l’équilibre des délais favorise la requérante qui a accusé un retard de 27 jours dans le dépôt de sa demande de prorogation. Aux dires de la requérante, voilà qui contraste avec le délai inhérent au procès-verbal, alors que 10 mois se sont écoulés entre la perpétration de l’infraction alléguée et la date à laquelle le procès-verbal a finalement été délivré au CN.

[30] Le ministre réfute cette affirmation en prétendant, entre autres, qu’il subira un grave préjudice si la demande de prorogation est accordée. Le ministre fait ici référence au délai de 30 jours applicable aux demandes de révision et à la certitude du droit ou au « caractère définitif des décisions » qui découle de son imposition. Selon le ministre, il s’agit là d’un principe fondamental qui soulève des questions relatives à la justice administrative, à l’irrévocabilité, à l’équité et à l’efficacité en vertu de la Loi sur la sécurité ferroviaire.

[31] Le ministre soutient qu’on doit reconnaître l’applicabilité du principe de la certitude ou de l’irrévocabilité lorsque les délais ne sont pas respectés et que les avis sont maintenus. L’octroi d’une prorogation ne constitue donc pas un simple « inconvénient administratif ». Le ministre affirme en substance que l’octroi automatique de prorogations, sans plus, porte atteinte à la stabilité du processus décisionnel administratif et à la déférence à accorder à ces décisions. Ces décisions reposent sur des délais et des critères précis que la loi précise et, implicitement, sont dans l’intérêt de la bonne administration de la justice.

[32] L’acceptation de la demande de révision tardive en l’espèce, compte tenu entre autres des délais associés à la délivrance du procès-verbal, n’est pas préjudiciable au ministre puisque ce dernier conserve la possibilité de prouver la violation alléguée dans le cadre d’une audience.

(4) Le demandeur a-t-il une explication raisonnable pour justifier le retard?

[33] La requérante affirme avoir omis de respecter la date limite en raison d’événements indépendants de sa volonté, notamment les défis en matière de ressources humaines occasionnés par la persistance de la pandémie de la COVID-19 au début de 2021. Le CN fait état d’une réduction de ses effectifs à cause de la pandémie, d’une charge de travail croissante au sein de son service juridique interne et d’incertitudes liées à l’exploitation pendant la pandémie, ce qui a rendu la gestion des dossiers trop ardue. Finalement, le 24 mars 2022, la requérante a fait appel à de l’aide en déléguant à un cabinet d’avocats externe la gestion de ses dossiers actifs dans la province de Québec.

[34] Selon le représentant de la requérante, l’importance d’agir ainsi s’est manifestée lorsque le CN a reçu la lettre du ministre du 23 mars 2022, dans laquelle celui-ci s’enquérait du paiement de l’amende indiquée dans le procès-verbal. Le représentant soutient que le CN s’est rendu compte de son omission à ce moment-là, et qu’il a immédiatement entrepris des mesures correctives.

[35] Le représentant du CN affirme en bref que l’omission résultait à l’époque d’une erreur administrative dans la « gestion de ses courriels ».

[36] Le ministre rétorque en soutenant que l’omission était due à un manque de diligence de la part du CN. Selon lui, le défaut du CN dans ce cas-ci contraste avec la ponctualité des nombreux autres transporteurs ferroviaires, aériens et maritimes qui, malgré la pandémie et les contraintes qu’elle a imposées, ont été en mesure de respecter des délais similaires dans leurs domaines respectifs.

[37] En ce qui concerne l’omission en l’espèce, le ministre ajoute qu’il n’y a pas d’information précise sur les raisons pour lesquelles l’omission a eu lieu, ou d’autres renseignements relatifs aux systèmes internes mis en place afin de prévenir ce genre d’erreur.

[38] À cet égard, en déduisant l’existence d’un défaut du système, le ministre fait référence à une récente demande de prorogation distincte du CN, soit l’arrêt Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Canada (Ministre des Transports), 2021 TATCF 29 (décision interlocutoire), où un délai similaire avait été dépassé de trois semaines.

[39] Le ministre soutient qu’il appartient à la requérante de démontrer l’existence de circonstances atténuantes, ce qui, selon lui, n’a pas fait si l’on se fie à l’explication des événements offerte par le CN.

[40] Je considère que la pandémie en cours à l’époque et les obstacles administratifs qu’elle a présentés au service des Affaires juridiques du CN invitent le Tribunal à exercer son pouvoir discrétionnaire.

[41] Les explications du CN démontrent que les contraintes vécues par son service juridique en raison de la pandémie étaient sérieuses, perturbatrices et prolongées.

[42] Dans l’ensemble, mon appréciation de la preuve et des arguments relatifs aux quatre critères susmentionnés m’incite à exercer mon pouvoir discrétionnaire et à accueillir la présente demande. Il est vrai qu’il ne ressort pas clairement de la preuve que le CN a manifesté une intention constante de demander une révision du procès-verbal. Il n’y a tout simplement pas eu de communication liée à la révision entre la requérante et le ministre ou le Tribunal du 28 janvier 2022 au 29 mars 2022. Néanmoins, le fond du débat touche à la diligence raisonnable globale du CN en matière de sécurité de l’exploitation. La preuve et les arguments à ce sujet justifient que les parties soient entendues dans le cadre d’une audience en révision. Ce faisant, le ministre n’est pas lésé dans son droit de présenter et de prouver les allégations contenues dans le procès-verbal. Enfin, la justification du CN quant au non-respect du délai, soit des contraintes créées par la pandémie en cours à l’époque, est raisonnable. Tout compte fait, et à la lumière de mes constatations en l’espèce, je conclus que l’intérêt de la justice sera bien servi par une audience en révision devant le Tribunal.

III. DÉCISION

[43] La demande de révision tardive est accueillie. Le Tribunal organisera une conférence préparatoire afin de discuter de la planification de l’audience.

Le 4 octobre 2022

(Original signé)

George « Ron » Ashley

Conseiller

Représentants des parties

Pour le ministre :

Éric Villemure

Pour la requérante :

Pierre D. Grenier

 

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